Les cours d’eau du Québec portent la marque des aménagements passés, notamment en milieu agricole. La linéarisation et le surcreusement ont cependant déstabilisé les berges et altéré la capacité hydraulique des cours d’eau, occasionnant divers impacts.
L’aménagement des cours d’eau est étroitement lié au développement économique et territorial. Au Québec, les cours d’eau ont notamment été aménagés pour la navigation, la production d’hydroélectricité, la régulation des niveaux d’eau, l’approvisionnement en eau, les activités industrielles et la production agricole.
En milieu agricole, les cours d’eau des basses-terres du Saint-Laurent ont été fortement modifiés, soit linéarisés, surcreusés, élargis, ou prolongés vers l’amont, afin d’assurer le drainage des terres et améliorer la pratique agricole. L’aménagement des cours d’eau a été subventionné par le gouvernement québécois pendant plusieurs années, de sorte qu’au début des années 2000, la longueur totale de cours d’eau aménagés était estimée à environ 30 000 km(1).
Une fois linéarisés, les cours d’eau agricoles nécessitent souvent des travaux de stabilisation et d’entretien récurrents liés à l’érosion des berges ou à l’accumulation de sédiments sur leur lit, pouvant ainsi nuire à leur capacité hydraulique et obstruer les sorties de drain. La fréquence d’intervention varie selon le contexte, mais peut représenter des efforts et des coûts importants. À titre d’exemple, pour la période 2011-2012 en Montérégie, le linéaire de cours d’eau agricoles entretenus totalisait 250 km par année(2).
Les interventions dans les cours d’eau, lorsqu’ils ne tiennent pas compte du contexte hydrogéomorphologique et écologique du cours d’eau, vont occasionner des impacts négatifs, tels que :
- L’incision verticale accrue du lit,
- La déconnexion du lit mineur avec sa plaine alluviale,
- La hausse de la température de l’eau,
- L’augmentation de la production primaire engendrant une baisse de diversité des habitats aquatiques
Cela entraîne une détérioration de la qualité de l’eau et une diminution de la capacité des cours d’eau à résister aux crues et aux périodes d’étiage.
En milieu agricole, les rivières montrent généralement un état de dégradation préoccupant(3), particulièrement dans la vallée du Saint-Laurent et en Montérégie. Ainsi, seules deux (3%) des 59 stations suivies en milieu agricole par le ministère de l’environnement indiquaient un bon état écologique pour la période 2015-2017, tandis que 14% étaient en état précaire, 21% en mauvais état et 59% en très mauvais état selon l’Indice Diatomées de l’Est du Canada(4).
Pour la même période, la qualité de l’eau de nombreux cours d’eau agricoles au Québec était préoccupante. Sur 22 cours d’eau suivis, 17 étaient en mauvais ou très mauvais état, principalement à cause de concentrations excessives en phosphore, azote et turbidité, dépassant fréquemment les seuils pour la protection de la vie aquatique. Les pesticides, notamment herbicides et insecticides, étaient détectés dans plus de la moitié des rivières échantillonnées de 2012 à 2017, avec des dépassements chroniques dans plus de 50 % des échantillons contaminés. Seulement trois rivières ne présentaient aucun dépassement3.
À la présence de ces contaminants s’ajoutent différentes perturbations physiques des cours d’eau en milieu agricole, leur degré de naturalité étant généralement faible3. À titre d’exemple, au cours du siècle dernier, près de 20 000 km de cours d’eau ont fait l’objet de travaux de linéarisation et de recalibrage et 10 000 km de cours d’eau ont été créés afin d’améliorer le drainage des terres agricoles1.
Références
1.Beaulieu, 2001 / 2.Gravel, 2019 / 3.MELCC, 2020 / 4.MELCCFP, 2024